Big bisous bien baveux
L'amitié a bien changé depuis le temps des mots dans les agendas des copines.
Bonjour,
Le printemps est arrivé, les semaines passent toujours aussi vite et moi ça fait un moment que j’ai envie de vous parler d’amitié. Et plus précisément : des amitiés de grandes personnes.
Je ne sais pas si c’est une question d’âge, de génération, de monde post-pandémie1 ou que sais-je encore, mais se questionner sur l’amitié est un sujet récurrent dans mon entourage. On se demande comment se faire des amis, on se questionne sur la façon dont les amitiés ont évolué, changé… mais souvent, la discussion se termine sur un soupir las, et quelque chose comme “vaste question que l’amitié…”. Bon, souvent ce soupir c’est de moi qu’il vient, tant ce sujet me laisse (parfois) un goût amer en bouche.
Pourtant, j’ai toujours été d’un caractère indépendant et un peu solitaire. Sans doute qu’une enfance passée en majeure partie avec moi-même (je ne suis pas allée à la maternelle, à l’époque elle n’était pas obligatoire) puis rythmée par quelques déménagements (qui ont induit d’être la nouvelle un bon nombre de fois) a forgé ce caractère, un peu malgré moi.
Si j’ai parfois regretté de ne pas être comme certaines de mes copines, qui avaient la même bande d’amis depuis la maternelle, et si je suis à peu près certaine d’avoir détesté (sur le moment) arriver en cours d’année dans une nouvelle école ou un nouveau collège, j’en ai finalement fait une de mes forces et aller vers les autres est devenu de moins en moins effrayant avec les années.
C’est ainsi que tout au long de ma vie, j’ai beaucoup papillonné en amitié. À chaque ère de ma vie, des personnes ont intégré mon cercle intime, tandis que d’autres l’ont quitté et si ça m’a parfois rendue triste, je reste assez pragmatique : c’est la vie et ça n’efface pas les jolis moments et les souvenirs.
Et pourtant… dernièrement, je me sens par moments assez seule. Si j’ai toujours cru dur comme fer que l’amitié ne s’altérait pas avec le temps et la distance, ces jours-ci je m’interroge et regrette ces temps insouciants où l’amitié était faite de messages réguliers, de verres en terrasse impromptus et de légèreté, en somme.
L’amitié de grande personne me frustre énormément. Planifier des brunchs deux mois en avance, toujours avoir l’impression de tomber comme un cheveu sur la soupe dans le planning chargé des uns et des autres, s’envoyer des messages-fleuves tous les six mois pour prendre des nouvelles mais sans réellement échanger sur la véritable teneur de nos vies… tout ça me dépite, mais en même temps, que peut-on y faire ?2
Aujourd’hui, on semble doucement vouloir remettre l’amitié sur le devant de la scène, ne plus ériger le couple et la famille en modèle unique d’amour(s) (c’est notamment développé par Victoire Tuaillon dans son podcast + livre Le Cœur sur la Table dont je n’ai pas écouté tous les épisodes, mais qui m’avait beaucoup plu à l’époque) mais alors il va falloir nous donner le mode d’emploi parce que si la théorie est alléchante, comment on met ça en œuvre, concrètement ?
Il y a peu, il m’est arrivé une drôle d’histoire - j’ai retrouvé, par un hasard improbable, une copine que je n’ai pas vue depuis au moins six ans. Je l’ai notamment reconnue alors qu’elle était assise devant moi au cinéma (dans la salle la plus spacieuse du plus grand ciné de Paris, il faut le faire !) et long story short, on a pris un verre récemment ensemble et la spontanéité de ces retrouvailles m’a fait le plus grand bien.
Vous le savez peut-être, ces derniers mois j’ai eu un moral vacillant, sans que je puisse exactement mettre le doigt sur ce qui n’allait pas (même si bon, j’avais plusieurs idées sur la question). Mais je crois qu’une certaine forme de solitude affective y contribuait beaucoup. Je me sentais un peu comme une sims, avec une barre de vie sociale au rouge.
C’était d’autant plus paradoxal (et donc source de culpabilité) que je suis plutôt bien entourée au quotidien : j’ai un amoureux très présent, une sœur qui est grosso modo ma meilleure amie et que je vois régulièrement, une famille dont je suis proche et des collègues aussi vraiment très chouettes.
Aujourd’hui, ma barre sociale n’est plus au rouge, mais pour combien de temps ?
Alors si se faire de nouveaux amis (et faire perdurer ses amitiés existantes) est un sacré merdier comme le dit Cy, je pense tout de même que les nouvelles amitiés à l’âge adulte peuvent (parfois) se révéler plus enrichissantes - peut-être parce qu’elles sont moins basées sur les circonstances (comme être dans la même classe à l’école) ou parce qu’on sait davantage ce qu’on veut (l’expérience rend plus exigeant après tout). Mais oui, ça reste compliqué de se faire facilement de nouveaux (vrais) amis passé un certain âge.
Sans compter que tout le monde n’a pas la même définition de l’amitié, les mêmes attentes ou envies. Il est même fort probable que ces paramètres varient chez une personne au cours d’une vie…
Bref, je crois que l’amitié est un sujet sans fin et j’ai à peine touché du doigt tout ce que j’en pense, mais écoutez, c’est un début. Et vous, ça vous travaille aussi, l’amitié ?
Trouver refuge dans la fiction
Mes dernières lectures ont été très éclectiques (comme souvent en réalité) et m’ont toutes apporté des choses différentes, voici celles que j’ai préférées…
J’ai beaucoup aimé Quand tu écouteras cette chanson, de Lola Lafon, texte hybride, ni fiction, ni tout à fait témoignage ou essai, dans lequel l’autrice déroule la nuit qu’elle a passé dans l’Annexe où était cachée Anne Frank et où cette dernière a écrit son fameux journal. Il y est question d’Anne Frank bien sûr, mais peut-être pas sous son angle habituel, et de plein d’autres choses aussi, intimes et émouvantes, qui m’ont remuée.
Tant qu’on est dans les récits qui ne sont pas fictionnels, j’ai aussi lu L’Âge Bête, de Géraldine Dormoy, parce qu’à force de lire sa newsletter de temps à autres, j’étais curieuse de me plonger dans ce témoignage de son adolescence, période ô combien source de nostalgie dans l’inconscient collectif. Eh bien ça m’a effectivement plongée dans une nostalgie de ma propre adolescence, même si je ne suis pas exactement de la même génération que Géraldine. Tout ne m’a pas paru intéressant (mais comment juger de l'intérêt d'une vie autre que la sienne ? c'est très subjectif) mais bon, vous savez comme j’affectionne la nostalgie…
Côté romans, j’ai lu Le Renard, de mon amie Pauline Harmange et j’ai vraiment beaucoup aimé ce récit qui parle de souvenirs, de peurs, des relations entre sœurs, de cette période entre l’enfance et l’adolescence (encore !), mais aussi de nature et des hommes qui se l’accaparent. C’est presque un conte initiatique et comme toujours, la plume de Pauline m’a beaucoup plu.
Enfin, je suis dans une petite période Alexandre Clérisse en BD… Après avoir lu Feuilles Volantes que je m’étais offert l’été dernier et que j’ai trouvée superbe et inventive (bien que son dénouement m’ait quelque peu déroutée), j’ai emprunté tout ce que mon réseau de médiathèques avait en stock, à savoir L’été Diabolik et Souvenirs de l’empire de l’atome.
Je n’ai pas encore lu ce dernier, mais j’ai beaucoup aimé L’été Diabolik, qui se déroule dans une ambiance 60’s, sur fond d’intrigue d’espionnage et de premiers émois d’adolescent : un très bon moment de lecture !
Bon et puis deux mots sur les derniers films que j’ai vus au ciné : j’ai aimé The Lost King, un film de Stephen Frears, britannique comme je les aime, qui raconte l’histoire vraie de Philippa Langley qui a aidé à exhumer les restes du roi Richard III (qui, dans ce film, prend les traits d’un acteur qui ressemble à Tom Hiddleston, c’est très plaisant), j’ai aussi été assez émue devant Sage-homme et je ne m’y attendais pas et enfin, j’ai passé un bon moment devant Super Mario Bros, parce que parfois un film d’animation prévisible c’est exactement ce qu’il vous faut après une semaine éreintante.
Et pour terminer, j’ai pas mal écouté le dernier album de Lana Del Rey ces temps-ci, que je trouve peut-être même plus réussi que le précédent, même si écouter Lana c’est aussi le réconfort de la constance, s’enrober à la fois de mélancolie et de douceur, quel que soit l’album…
Je vous souhaite un beau dimanche, merci de me lire et n’hésitez pas à partager vos réflexions autour de l’amitié avec moi - comme je le disais, le sujet est vaste !
À bientôt !
Oui, enfin, même si ça n’est pas vraiment terminé…
Brûler le capitalisme et vivre d’amour et d’eau fraiche, ou quelque chose dans ce genre, non ?
Je te rejoins tout à fait sur ces questions sur l’amitié. Elles me font réaliser qu’on trouve assez peu de réponses sur ce thème en littérature. Du moins il me semble, je vais approfondir le sujet !
C'est vrai qu'on en discute pas mal ces derniers temps avec mes ami-es et collègues qui ont la trentaine ! On traverse une période de reconfiguration des amitiés, avec des amitiés qui se distendent du fait de l'éloignement géographique et aussi de vies qui prennent des rythmes et des directions différentes (la parentalité ou non-parentalité s'inscrit là-dedans aussi forcément). Et en ce qui me concerne je me suis en revanche rapprochée d'autres personnes. Je me sens chanceuse quand-même car j'ai de nouvelles amitiés qui se sont développées dans le cadre du travail - je suis doctorante - et j'ai l'impression d'avoir eu comme une "rallonge" de la période scolaire et universitaire où on a des ami-es qui sont aussi des camarades de classe ! Maintenant j'appréhende un peu des évolutions des prochaines années. Mais je suis aussi assez décidée à donner une place importante aux amitiés dans ma vie et à les alimenter activement.