Bonjour,
Une belle journée estivale se termine doucement, j’écoute ma playlist de chansons de Natalia Lafourcade (de la musique que je n’arrive pas à qualifier autrement qu’ensoleillée et qui accompagne mes beaux jours depuis quelques années maintenant) et je compte bien profiter de mon week-end pour me reposer (sans l’ombre du concours qui plane au dessus de ma tête).
Je vous disais récemment que cette saison, sa douceur et sa verdure étaient pour moi comme une renaissance, et c’est vrai - le bleu du ciel me ravit, je laisse mes pensées divaguer dans le vert des feuilles des arbres, le chant des oiseaux me met en joie.
C’est aussi le moment de reléguer au placard collants, bottines, manteaux et pulls, et si je suis heureuse de retrouver mes jupes fleuries et autres atours d’été, je retrouve aussi mes vieux complexes…
Cela fait quelques années maintenant que je déplore avoir pris du poids, sans trop m’en rendre compte, doucement mais sûrement. Probablement un mélange d’arrêt de la cigarette, d’ennui professionnel, puis de chômage et de pandémie. Je pensais qu’un retour à la vie active1 il y a bientôt deux ans me ferait perdre un peu de poids, mais vraisemblablement, non, mon corps n’a pas daigné se délester ne serait-ce que de quelques kilos.
À vrai dire, je ne crois pas que mon poids ait beaucoup varié ces deux dernières années, mais je ne me suis toujours pas faite à l’idée qu’il a fallu que je change de taille de vêtements et je regrette toujours de ne plus rentrer dans certaines robes que j’aimais beaucoup. Je suis dans une forme de déni, et si je suis honnête avec moi-même, je ne me sens pas forcément toujours très bien dans ma peau.
Quand par malheur je croise mon reflet dans un restaurant ou dans la rue2, je ne me reconnais pas dans ce corps. L’image que j’ai de moi et de mon corps est restée bloquée quelque part en 2017 et je n’arrive pas à accepter ce nouveau corps. Je ne veux pas l’accepter.
Pourtant, si mon regard se fait bienveillant envers autrui, je n’arrive pas à porter un regard moins exigeant sur moi-même et je vous assure que ça me désole.
Je crois qu’on ne nous apprend jamais vraiment à habiter nos corps (à fortiori quand on est une femme). On nous apprend à les contrôler, les façonner, les mettre en valeur, à leur faire prendre moins de place mais jamais à les éprouver. Cette déconnexion (plus ou moins marquée selon les individus) nous coupe forcément de nos ressentis et nous fait envisager nos corps presque comme quelque chose d’extérieur à nous-même.
Peut-être qu’on devrait apprendre ça à l’école - inspirer, expirer, regarder ce que ça fait en nous, ou encore avoir des cours d’éducation physique qui ne poussent pas à la performance, à la comparaison, mais juste à la joie d’être en mouvement. Et peut-être aussi lâcher écrans et univers de fiction, s’ennuyer et en profiter pour se concentrer sur nos sensations, nos pieds nus sur le parquet, nos vêtements sur notre peau… Je ne sais pas si ça changerait tout (probablement que non), mais qui sait, le faire plus souvent pourrait peut-être nous permettre de mieux prendre possession de nos corps. Et de les considérer avec davantage d’indulgence et de douceur.
Si je crois être davantage à l’écoute de mon corps au fur et à mesure que j’avance dans la vie, je ne réussis pourtant pas toujours à l’habiter avec beaucoup de sérénité, et ce sentiment s’accompagne d’un certain fatalisme (et de culpabilité), parce que j’ai envie de mincir mais que je sais aussi que les régimes ça ne fonctionne pas vraiment (et je culpabilise donc de ne pas simplement faire la paix avec ma silhouette).
Pour éprouver davantage mon corps j’ai bien pensé à me remettre en mouvement - refaire du yoga régulièrement, aller en salle de sport3… - mais outre que j’ai bien du mal à voir où caser ces moments dans mes semaines chargées, j’ai aussi peur de trop le relier à un espoir de perte de poids et d’entretenir de fait un rapport pas très sain avec l’exercice.
Par chance, ces frustrations corporelles ne se répercutent pas vraiment dans mon assiette. Je ne diabolise aucun aliment, je ne mange pas mes émotions, je ne me prive pas, je veille à manger de façon équilibrée, mais sans fustiger mes excès occasionnels. C’est déjà ça.
En attendant de m’en foutre totalement, je continue donc de fuir mon reflet. (et de faire semblant de m’en foutre totalement, à force de faire comme si ça finira peut-être par être vrai)
Des choses à lire et à regarder
Dès le lendemain de mon concours, je me suis replongée avec avidité dans la lecture pour le plaisir, adieu notions de culture territoriale et autres actualités de bibliothéconomie !4 J’ai donc lu le dernier Christelle Dabos, Ici et seulement Ici, mais ce n’était pas un coup de cœur (si vous voulez lire mon avis complet, il est sur Goodreads).
Par contre, j’ai enfin lu Le Monde sans fin, de Jancovici et Blain, la BD-documentaire qui est en tête des ventes depuis sa sortie (ou quasi) et c’était assez édifiant, même si je crois que cette lecture n’a fait qu’accroître mon éco-anxiété. C’était cependant assez instructif (j’ai appris des façons de mettre en perspective le changement climatique et nos besoins en énergie) et non dénué d’humour, même si je regrette un peu que la BD donne peu de pistes d’actions à mener à notre niveau, ainsi que la frilosité des auteurs concernant la consommation de produits d’origine animale…
J’ai également terminé il y a quelques jours un court essai que j’ai trouvé très intéressant. Il s’agit de Politiser le bien-être, de Camille Teste, qui s’emploie ici à déconstruire l’industrie du bien-être, alertant sur ses dérives néoliberales qui promeuvent l’hyper-individualisme et nous font croire que notre bien-être ne dépend que de nous.
L’autrice envisage des façons de se réapproprier ces pratiques de bien-être dans une démarche inclusive et révolutionnaire, en évoquant des façons de “mieux” faire, collectivement, pour que le bien-être fasse partie de nos luttes. J’ai vraiment trouvé cet essai pertinent, bien documenté et bien écrit en sus ! À découvrir, si le sujet vous intéresse.
Sinon en ce moment je redécouvre Dickinson, la série qui met en scène Hailee Steinfield en Emily Dickinson, poétesse américaine du 19e siècle et qui est disponible sur Apple TV+ (trois saisons).
J’avais vu la première saison il y a assez longtemps, et je n’avais pas été séduite outre mesure, un peu décontenancée par ses anachronismes, mais en regardant la deuxième saison récemment, j’ai un peu revu ma copie… J’ai notamment été prise au jeu du surréalisme de certains épisodes et assez touchée par le personnage d’Emily, en proie aux doutes. Et ça m’a donné envie d’aller acheter un recueil de ses poèmes aussi, évidemment.
Et je vous laisse avec l’une de mes chansons favorites de Natalia Lafourcade, même si en réalité je les aime toutes - j’espère que ce morceau apportera un peu de soleil dans votre journée !
Merci de me lire et bon dimanche à tous‧tes !
Il y aurait beaucoup à dire sur ce terme, et sur ses implications en creux (ne pas travailler n’est pas nécessairement être inactif…) mais c’est un autre sujet.
Car je n’ai pas de miroir en pied chez moi.
Je n’y ai jamais mis les pieds, mais peut-être que ça me plairait ?
Du moins pour quelques semaines, je m’y remettrai cet été, au cas où je serai admissible à l’oral…
Je suis tellement en phase avec ce que tu racontes ! Ca fait quelques années/mois ? que je me sens relativement OK avec mon corps, avec des messages comme "non mais les régimes c'est inutile et dangereux, tous les corps sont beaux, l'important n'est pas l'apparence du corps mais comment on se sent dedans"... Je n'ai plus de balance chez moi depuis un bon moment...
Et suite à une pesée chez le médecin du travail, quelques pantalons trop étroits, et donc, 5 kilos de plus et "en trop"... bah c'est vachement plus dur de tenir le même discours quand la glace renvoie un reflet qu'on a du mal à accepter et qui ne correspond plus exactement aux normes de beauté.
Et je culpabilise de penser ça de moi alors que je pensais être relativement en paix avec mon corps, lol.
J'ai donc repris le mouvement, le sport, mais surtout ça doit être quelque chose que j'aime, que j'ai envie de faire, qui ne soit pas une corvée. Sinon je sais que ça sera évincé à la moindre excuse et que ça deviendra une nouvelle source de culpabilisation ! Si ça peut t'aider comme ça m'a aidé, j'adore les walking workouts sur youtube (Get fit with Rick, Grow with Jow) et en ce moment je suis un petit programme facile à caser dans mon emploi du temps (je ne fais pas tous les jours, juste quand j'en ai envie, soit environ 3/4 fois par semaine - et pour moi c'est énorme), celui de MonikaFit (Move) sur Youtube toujours.
Et sinon, il y a le yoga, la danse, l'escalade, l'escrime, le kickboxing, ou même le foot... tout un tas de sports qui peuvent te faire kiffer de bouger, juste pour le plaisir ! J'ai fait de la danse cette année, j'ai envie de tenter l'escalade à la rentrée, avec une activité + fitness mais fun... bouger c'est important pour se sentir bien même si la silhouette n'est pas ce qu'on aurait imaginé. Il faut vraiment trouver LE truc qui t'amuse, qui te donne envie d'y retourner, qui te fait du bien.
Et comme on a tout de même parfois besoin d'une validation extérieure... Tu es une personne parfaite comme tu es ! Jolie comme un cœur et avec une réflexion, une plume, des analyses... super intéressantes et pertinentes ! Continue d'être toi :)
J'ai regardé une interview de Blast de Camille Testé, ça m'a v vraiment donné envie de le lire, capitalisme et les injonctions au bien être vont de pair...